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L’image de la plante de cannabis est souvent associée aux représentations sociales de la drogue. Pour la plupart, le mot “drogue” peut faire peur, étant rattaché à la notion d’addiction, de toxicomanie ou encore de marginalité. Une question revient très fréquemment parmi les nouveaux usagers de cannabis : la consommation de CBD peut-elle rendre dépendant ? 

Pour y répondre, il est important dans un premier temps de redéfinir les notions de dépendance, physique et psychique. 

Selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), le syndrome d’addiction est : “un ensemble de phénomènes comportementaux, cognitifs et physiologiques dans lesquels l’utilisation d’une substance psychoactive spécifique ou d’une catégorie de substances entraîne un désinvestissement progressif des autres activités. […] La notion de dépendance psychologique ou psychique fait référence à la consommation incontrôlée d’alcool ou de substances psychoactives, tandis que la dépendance physiologique ou physique concerne la tolérance et les symptômes de sevrage.”

QU’EST-CE QUE L’ADDICTION AU CANNABIS ?

Il faut différencier l’addiction au cannabis et l’addiction au CBD. En effet, la plante comporte plus d’une centaine de molécules différentes dont les phytocannabinoïdes, les terpènes, les terpénoïdes ou encore les flavonoïdes. Le CBD (cannabidiol) est un des nombreux phytocannabinoïdes, au même titre que le THC (tétrahydrocannabinol) ou le CBG (cannabigerol). Mais seul le THC présente un potentiel addictogène. En effet, le THC agit sur le circuit de la récompense et de la motivation, directement lié à la dépendance, en raison de l’augmentation des concentrations en dopamine (un neurotransmetteur) dans les circuits mésolimbiques. Ce potentiel addictogène a été évalué scientifiquement par l’étude NERSAC (Irlande, 2011) à 8,9%. Selon ce même classement le tabac présente un risque de 67,5% et l’alcool un risque de 22,7%. 

La notion de dépendance est aussi liée au mode de consommation. En France, la combustion est le mode le plus répandu (1,4 million sur les 1,5 millions de consommateurs réguliers, c’est à dire 1 à 10 fois par mois) ainsi que l’utilisation du tabac mélangé aux fleurs de cannabis (1,3 million). Sachant que le tabac est une substance très addictive, il n’est donc pas étonnant que ces consommateurs observent une sensation de dépendance au cannabis, consommation alors qualifiée de problématique. Elle serait davantage liée au tabac lui même qu’au cannabis. Diminuer voire arrêter la consommation de tabac permettrait donc de limiter drastiquement la dépendance au cannabis. 

La notion de dépendance à n’importe quelle substance, dont le cannabis, est aussi étroitement liée à la quantité. Une consommation excessive présentera de manière logique un plus grand risque de développer une accoutumance. De même, l’âge de primo-consommation (âge de la toute première consommation) est un critère pouvant aussi avoir une influence sur le fait de développer ou non une dépendance. En effet, une primo-consommation avant la fin de la croissance encéphalique favoriserait le risque de dépendance (estimé à 8 fois supérieur par rapport à une primo-consommation après la fin du développement cérébral). 

LE CBD NE REND PAS DÉPENDANT BIEN AU CONTRAIRE

Comme expliqué précédemment, le CBD n’exerçant pas d’effet sur les concentrations en dopamine, il ne peut pas rendre dépendant. A l’inverse, il peut s’avérer particulièrement utile dans le traitement des addictions. En effet, il présenterait un potentiel anti-craving, c’est à dire qu’il pourrait limiter les symptômes de manque (hallucinations, hyperthermie, nausées et vomissements, tremblements, sensibilité à la lumière, diarrhée…) et le craving (besoin irrépressible de consommer une substance). Plus simplement, le CBD permettrait de limiter l’envie de consommer des substances addictives (tabac, alcool…) et ainsi de limiter tout risque de rechute.

Une étude publiée en 2019 rapporte des résultats très positifs sur l’utilisation du CBD chez des usagers d’opioïdes. “L’administration immédiate de CBD, contrairement au placebo, a réduit de manière significative à la fois l’envie et l’anxiété [liées au syndrome de manque] … Enfin, le CBD a réduit les mesures physiologiques du rythme cardiaque et des niveaux de cortisol salivaire induites par les substances opioïdes. […] Aucun effet indésirable grave n’a été constaté.” 

Une autre étude particulièrement prometteuse a lieu en ce moment en France. Il s’agit de l’étude CARAMEL, menée à l’hôpital de la Croix-rousse à Lyon par les équipes de l’addictologue Benjamin Rolland. Elle a pour but de tester l’efficacité du CBD par rapport à celle d’un placebo chez 76 sujets présentants un trouble de l’usage d’alcool et une forte consommation (plus de 12 verres par jour). Les résultats de cette étude sont attendus avec grande impatience par le corps médical. 

En conclusion, le CBD ne présente aucun risque de dépendance s’il est consommé sans THC et sans combustion associée au tabac, comme c’est le cas dans les huiles de CBD. Il pourrait même être utile dans le traitement des comportements addictifs et le sevrage des substances. 

Dans un contexte où les addictions, notamment aux opioïdes, deviennent un problème de Santé Publique, la France souffre désormais d’une nette augmentation des décès dus à une surdose d’opioïdes (+146% entre 2005 et 2016). Le CBD et son potentiel thérapeutique pourrait donc s’avérer être une des solutions dans la prise en charge des addictions dans les prochaines années. 

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